La plage

Durant l'été 1890, Léon Pourtau séjourne en Normandie, et plus particulièrement au Tréport à l'instar de célèbres peintres tels que Boudin, Monet, Sisley, Renoir ou encore Gauguin, qui y avaient installé leurs chevalets quelques années auparavant, séduits par la vibrante lumière qui irradie les lieux.

En 1889, son ami Georges Seurat avait parcouru la région et réalisé Le Crotoy, amont, ¹ situé à quelques kilomètres du Tréport. L'inventeur de la technique du contraste simultané y représentait alors une nature sauvage, considérant qu'aucune présence humaine n'était nécessaire à la commission de son chef-d’œuvre.

Dans La Plage, Léon Pourtau, à l’inverse de son éminent confrère, prend le parti d'associer la nature aux hommes qui tendent à la maîtriser. Ici, la présence d'une digue rappelle à la foultitude qui se prélasse au soleil qu'elle n'a rien à craindre des caprices de la mer. Hommes et femmes profitent de l'instant présent, orientant pour la plupart leurs regards vers le large, synonyme d'avenir et de progrès pour le peintre musicien.

La Plage, n'est pas sans rappeler l'œuvre emblématique de Seurat, Un Dimanche après-midi à l'île de la Grande Jatte ², si ce n'est qu'ici, Pourtau prend de la hauteur, survolant la plage pour dépeindre les plaisirs balnéaires naissants. Si dans La Grande Jatte, Seurat limite l'horizon à un dédale verdoyant, qui peut inquiéter le spectateur par son côté obscur, les trois niveaux délimités par Pourtau dans La Plage, libèrent un espace infini, propre à sa nature optimiste. Le ciel, la mer et la plage bénéficient de la même touche, généreuse et multiple, tandis que les couleurs dans une juxtaposition savante s'harmonisent pour le plaisir de tous.